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andrée chedid

  • Chemin faisant - Balade poétique à Condillac

    En ces temps troublés par la guerre en Ukraine, par les tempêtes qui secouent la planète, des petites joies se faufilent dans les villages et sur les chemins de campagne.
    Geneviève et André, les colporteurs-liseurs, ont été sollicités par la médiathèque de Montélimar dans le cadre de Itinérance(s) ; à eux, se sont greffés d'autres liseurs : Naïs, Juan-Antonio et deux jeunes musiciens, Esteban saxophoniste et Maïa violoncelliste. Une équipe pour faire entendre poésie d'ici et d'ailleurs.
    Une trentaine de promeneurs s'étaient rassemblés autour d'eux ce samedi 30 avril.
     
    Revenir à la source, aux sources de la Layne à Condillac qui eurent leur moment de prestige quand elles étaient autrefois exploitées.
    J'écoute le murmure des sources, dit Naïs, des mots extraits d'un recueil Un caillou qui pense oiseau. Et ils sont là les oiseaux dans les branches qui s'agitent sous la brise. Se disent alors des mots sur l'importance de l'eau d'un poème touareg.
    Il y a presque toujours dans les lectures des colporteurs-liseurs des textes teintés d'humour du poète ardéchois Paul Vincensini qu'ils ont connu :
    Moi j'ai toujours peur du vent 
    Me voici 
    Mes poches 
    Bourrées de cailloux
    Pour rester avec vous
    Ne pas m'envoler dans les arbres
     
    On grimpe alors sur la colline, tandis que des interrogations de Guillevic ponctuent la grimpette :
    La force de qui / La force de quoi / Rêvez-vous d'avoir / Et c'est pour quoi faire ?
    Christine de la mairie de Condillac se lance et pose une question de Michel de Maulpoix : À qui, à quoi as-tu donné ton temps ? 
    Le groupe manifeste le plaisir de l'échange, du printemps, du partage.
    Esteban sur son saxophone élève aussi sa question musicale, libre d'interprétation. Ses notes de cuivre accompagnent certains textes et illuminent l'instant. Sa sonorité sait devenir murmure pour doubler la voix d'André qui conte comment il est né de ses voyages : route route route soixante fois route je suis né d'elle.
    Le poème Les exilés rappelle les dures épreuves des déracinés dans le monde et la nécessité de les accueillir. Ils viennent à notre rencontre, dit le poème de Geneviève.
    Arrive le texte de Jean Louis Novert Nous sommes d'une longue marche. Jacky le maire de Condillac nous conte  l'histoire du château qu'on aperçoit environné par la forêt.
    Avec un texte de Natyot, Naïs parle de déplacer les montagnes.
    Tel est le pouvoir de la poésie, éveiller en nous l'essence des choses et nous donner la force d'agir. La meilleure impulsion ne serait-elle pas celle de l'amour ? Alors on entend les mots d'Alain Borne, poète montilien : Le monde est nu, je voudrais le vêtir d'un poème d'amour comme la page blanche.
    Les voix mêlées de Geneviève et André disent : Il y aura ceux qui s'aiment de Andrée Chedid.
    À la fin du parcours, c'est Maïa avec son violoncelle qui accueille les marcheurs. Elle accompagne Juan-Antonio qui dit en français et en espagnol un poème de Pablo Neruda sur Federico Garcia Lorca.
    Le spectacle nomade se clôt sur une phrase : L'espace est libre et les jeunes musiciens en harmonie l'expriment à leur façon. Ils nous enchantent avec un dernier morceau, La toccata de Girolami Frescobaldi. 

    Geneviève et André

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  • ELLES RIENT

    "Elles rient" de André Cohen Aknin
    À propos de "D'azur et de feu - Sept visage de Josette Duc" de Geneviève Briot, publié  par Bleu 31. 
    Article paru dans la revue A LITTÉRATURE ACTION N° 9 Octobre-décembre 2020

     

    I - LES DEUX FEMMES
    De mon enfance en Algérie, je garde des rires de soleil. Ils éclairent ma mémoire. C'est également le cas du rire de Josette et de Geneviève, le jour de la photo de la quatrième de couverture. Ce n'était pas un rire bruyant, ostentatoire, mais un rire plein, plein comme un corps entier, un corps de femme, plein comme un poème, un poème-rire.
    Elles riaient aux éclats, assises sur le canapé ; elles riaient d'être ensemble, de pouvoir se regarder, se parler. On aurait dit des adolescentes, même si l'une a 90 ans et l'autre presque 80. Josette est fille de menuisier ; Geneviève, fille de boulanger. Qu'ont-elles en commun ? D'être des femmes, d'être curieuses, d'avoir de l'intérêt pour les autres et une inébranlable volonté d'être libre, libre dans leur manière de penser et dans leur corps. Elles ont aussi le besoin insatiable de lire et celui d'écrire. Josette a beaucoup écrit sur ses carnets de voyage, Geneviève est écrivaine. Elles ont aussi en commun d'avoir enseigné. Josette était institutrice et Geneviève, professeur de français.
     
    Elles se sont rencontrées à un cours d'anglais. Josette y racontait volontiers ses voyages et ses découvertes. Peu à peu, leur relation s'est renforcée. Elles parlaient surtout de littérature, de spiritualité. Les photos de Ramana Maharshi et de Bruno Gröning affichées dans l'appartement de Josette impressionnaient Geneviève. Aujourd'hui, ces sages font partie de sa vie. Josette, elle, a espéré, la veille de sa mort, pouvoir rejoindre ces deux êtres dans l'autre monde.
     
    En 2017, un recueil de poésie de Geneviève est publié (1). Elle dit ne pas avoir d'autre projet. Mais il se passe ce qui se passe dans la vie d'un écrivain : l'impérieuse nécessité d'écrire qui vous tombe dessus sans crier gare. Le jour de la fête des 90 ans de Josette, Geneviève lui propose d'écrire sa vie. Une vie de passion, si pleine, si libre qu'elle ne se sentait pas faire autrement que d'en témoigner. Josette dans sa robe égyptienne paillée de fils dorés, acquiesce : "Si c'est toi, j'accepte."
     
    Écrire à partir d'entretiens, Geneviève l'a déjà fait pour Un livre à la mer (2), à partir d'interviews de personnes en lien avec l'Algérie. Elle ressort son magnétophone, prépare une foule de questions, avec la fièvre qui la caractérise, et se rend chez son amie.
     
    Les informations s'accumulent. Josette ne raconte pas chronologiquement, elle confie des anecdotes, passe de l'une à une autre, revient sur les précédentes. Il y a des ellipses. Difficile parfois de s'y retrouver.
     
    Les deux femmes conviennent que tout ne devra pas être publié. Il ne faudra pas non plus broder, inventer pour combler les vides. Josette parle de l'enfant qu'elle a été, de l'adolescente rêveuse et déterminée, de ses voyages, de ses rencontres, de sa vie d'institutrice, de son mari anarchiste. Josette partage les valeurs de fraternité et liberté des anarchistes sans adhérer au mouvement. Elle croit aussi en la solidarité sans adhérer à un parti, en la spiritualité sans entrer dans une religion instituée. Elle puise dans toutes sortes d'enseignements religieux et plus particulièrement dans les spiritualités orientales.
     
    Josette a aimé d'amitié ou d'amour des gens hors du commun. Vivre pour elle, c'était découvrir et aimer. Elle se souvenait avec émotion de sa passion amoureuse pour le vieil anarchiste libertaire Alexandre Marius Jacob. On entendit son témoignage sur France Culture en avril 2019, lors d'une émission sur ce personnage. Durant l'interview, Josette lut des extraits de lettres de Marius. Sa voix rayonnait comme celle d'un rire.
     
    On découvre dans le livre, pourquoi Josette n'a pas eu d'enfant. C'est une douleur. Isabelle devient au fil du temps sa fille spirituelle.
     
    Les choses se précipitent. Josette apprend qu'elle a un cancer. Elle suit un traitement. Mais celui-ci ne donne pas les résultats escomptés. Josette console ses proches, prépare méticuleusement son départ, donne tout ce qu'elle possède de son vivant. Geneviève héritera "naturellement" de son bureau.
     
    Quand Geneviève lui a présenté les premières épreuves de "D'azur et de feu", Josette a refusé de les lire, disant qu'elle avait bien d'autres choses à lire avant de s'en aller.
     
    Geneviève sent l'urgence, travaille d'arrache-pied. Elle souhaite montrer à Josette le manuscrit fini avant qu'il ne soit trop tard. Geneviève y met un point final, le jour où Josette est hospitalisée.
     
    Le lien entre les deux femmes est fait de rires, d'un profond respect et d'une admiration l'une pour l'autre, d'une joie, d'un fil d'âme, si l'on peut dire.
     
     II - LE LIVRE, LES SEPT VISAGES DE JOSETTE DUC 
    Avec "D'azur et de feu", on découvre la vie d'une Romanaise née à Châtillon St Jean dans la Drôme en 1927 et décédée en 2019 à l'âge de 91 ans. Josette Duc a vécu dans sa petite maison rue Sylvain Marmier, construite par son père, menuisier. Elle a épousé Robert Passas de Bourg de Péage en 1950. Robert était anarchiste, libertaire et poète. Josette, elle, était anti conventionnelle, spontanée, littéraire. Ils sont devenus enseignants, d'abord à l'Institut Thérapeutique Éducatif et Pédagogique de Geyssans, puis trois ans au Maroc. Ils sont revenus ensuite dans la Drôme. Ils aimaient enseigner et l'ont fait avec ferveur.
     
    Au fil du récit, on découvre plusieurs visages de Josette. On rencontre la désirante, l'amoureuse, la femme libre, la femme blessée, la voyageuse, la tisseuse de liens, la mystique. Elle est toute en un. Le livre s'organise selon ces sept visages, avec une introduction "Sous le signe de l'amour", sa famille, ses parents.
     Puis suivent huit chapitres :
    1) La désirante : Elle désire, elle veut ou ne veut pas. Elle a une force de vie.
    2) L'amoureuse : On découvre ses pulsions d'adolescente, puis ce fut la rencontre de Robert. Il est poète. Ils sont libres dans leurs amours et pourtant fidèles l'un à l'autre. La poésie, la littérature les unissent. La jalousie n'a pas cours.
    3) La femme libre : Josette fut le dernier amour d'Alexandre Marius Jacob, "l'honnête cambrioleur" du titre du livre de Jean-Marc Delpech son biographe. Il a fait 22 ans de bagne, fut libéré en 1927, l'année de la naissance de Josette. C'est Robert qui a rencontré le vieil anarchiste, qui s'est pris d'amitié pour lui et s'est réjoui devant l'amour de Marius et Josette. Il a écrit : "Elle tomba dans l'hiver de Jacob comme une branche d'avril". Il a 74 ans, elle en a 27.
    4) La voyageuse : Elle participa au Service Civique International pour aider les plus démunis, en France et à l'étranger. Elle voyagea souvent, parfois en autostop, pour aller voir des amis, par soif de découverte, pour se ressourcer spirituellement (USA, Croatie, URSS, Mali, Algérie, Turquie, Israël, La Dominique, l'Inde… et aussi le Transsibérien).
    5) La femme blessée : Robert et Josette vont vivre 20 ans ensemble, puis Robert s'en va. Le titre "D'azur et de feu" vient d'un poème de Paul Eluard "Je fis un feu, l'azur m'ayant abandonné". Blessures physiques et morales. Ce qui la faisait le plus souffrir : les séparations, la mort de ses proches.
    6) La tisseuse de liens : Josette est curieuse de tout, va de stage en stage, de rencontre en rencontre. Elle a des relations, des amitiés avec des gens hors du commun : le militant Louis Lecoin qui s'est battu pour la reconnaissance du statut d'objecteur de conscience ; un thérapeute japonais Itsudo Tsuda ; François Malkovsky, danseur élève de Isadora Duncan ; Madhury, une mystique ; Igor Reznikoff avec qui elle fait du chant grégorien ; Georges Krassovsky qui parcourt le monde à bicyclette et milite pour la paix ; Victor Lebrun, ami de Tolstoï ; Marcel Body, le secrétaire de Lénine ; Jeanne Humbert, une Romanaise libertaire qui s'est battue pour les droits des femmes (elle a une rue à Romans-sur-Isère). Sa relation amoureuse avec Hans (Jean Mermoux) durera 19 ans.
    7) La mystique : Elle se ressource à différentes spiritualités, celle de jeunes Hongrois relatée dans "Dialogues avec l'ange", des saints chrétiens : Ste Rita, Ste Marie-Madeleine, St François d'Assise. Elle s'initie à L'évangile selon Thomas, non reconnu par l'Eglise. Elle est fascinée par les conférences de Pierre Ganne, jésuite exclu par l'autorité pontificale du fait de son non-conformisme. Elle fait partie d'un groupe Douglas Harding, philosophe mystique anglais, suit l'enseignement de Bruno Gröning, guérisseur spirituel allemand. Elle va à des rencontres avec Amma, avec un yogi indien, avec Frère John Martin moine hindou et chrétien et, surtout, avec son maître spirituel, Ramana Maharshi. Son voyage en Inde à l'ashram de R. Maharshi confirmera son attachement à ce sage.
    8) Le huitième chapitre "D'azur et de feu" montre la plénitude d'une vie. Il y a son dernier amour avec René. Elle a alors 80 ans, elle pensait que sa vie amoureuse était terminée. Tout ce qu'elle a vécu se concrétise là : sa générosité, son amour des autres, son amour de la vie.
     
    Le récit est composé à partir d'écrits propres à Josette Duc et d'entretiens que Geneviève a eus avec elle. Leurs écritures se sont liées comme un tissage de laine et de soie, dit Claudia, une lectrice.
     
    III - LA FABRICATION DU LIVRE
    La mise en page a été réalisée par Colombe de Dieuleveult, une amie de Josette. Elles se sont rencontrées au moment où Colombe réalisait une thèse sur Alexandre Marius Jacob. Son travail de graphiste apporte beaucoup à la lisibilité, à l'organisation du livre et au traitement des photos.
    L'illustration est de Jean-Luc Boiré, qui ne connaissait pas Josette, mais qui fut séduit par son histoire.
    L'écriture, la mise en page et l'illustration ont été offertes, comme si un courant bienveillant passait entre ceux et celles qui participaient à ce livre. J'y ai pris ma part dans la relecture du manuscrit.
     
    IV - GENEVIEVE BRIOT, L'ÉCRIVAINE, LA POÈTE
    Pour découvrir la vibration de l'écriture de Geneviève, au-delà de ses romans, de ses récits et de ses pièces de théâtre, il faut plonger dans sa poésie. Car cette femme est une poète. Sa poésie oscille entre épaisseur et transparence, s'insinue entre peau et chair, puise dans le tréfonds de notre oubli, nous fait brûler de désir, nous rappelle qui nous sommes et le vaste monde qui nous attend. Avec elle, nous devenons caillou, oiseau, bruissement d'un feuillage, fontaine de son village natal de Lorraine, le bleu de Fra Angelico, un hêtre du Vercors, le sable roux du Grand Erg Oriental qu'elle a tant aimé et un marcheur d'un cortège clandestin (3). Avec elle le dimanche habille son regard de lilas (4).
     
    Je l'ai imaginée dans le désert d'Algérie, la peau tannée par le soleil, les mains teintes de henné et le regard brûlant pour les hommes et les femmes de Ghardaïa, à l'orée du désert. Elle est tombée en amour pour cette terre qui lui a inspiré plusieurs ouvrages (5).
     
    Geneviève est une amoureuse de la langue française et le Grevisse est sa bible.
     
    Paul Vincensini est son initiateur en poésie. Ils ont partagé la joie profonde de dire à haute voix. Il l'a entraînée dans le torrent de la poésie d'Alain Borne. Il faut entendre Geneviève dire les poèmes de ce dernier pour saisir sa passion pour la poésie.
     
    Les mots tenus à la crinière deviennent des notes de musique dans un souffle charnel et puissant. Ecoutez un poème d'elle, tiré de Météorites (6) :
     
    Tes mots chuchotés
    je les crie contre les murs
    me reviennent en pleins désirs
    et me mettent à genoux.
    Je ne demandais que ton corps
    où enfouir ma folie
    je ne demandais qu’un peu de ta bouche
    où puiser le rêve que je respire.
     
    Ta vie m’est un silence libre et profond.
     
    Je deviens surface gelée du lac
    les chiens me marchent dessus
    sans que je bouge un cristal.
     
    Ma vie est à claire-voie sur l’obscur.
     
    Le poète Guillevic ne s'y trompa pas lorsqu'il écrivit pour la 4ème de couverture de ce recueil que "la poésie de G.Briot… est plus originale qu'elle peut paraître au premier abord. Une originalité profonde : d'âme si j'ose dire. Il me plaît que ce soit une poésie de femme avec tous les attributs de femme : la sensibilité, la sensualité. J'aime beaucoup cette sensualité affirmée."
     
    Guillevic est un poète qui a compté, qui compte toujours pour Geneviève. Elle l'a rencontré à Rochessauve en Ardèche lors d'un événement poétique. Elle est restée en relation avec Lucie, sa femme. Je retiens chez Guillevic la densité de ses textes, sa capacité à provoquer et saisir les déséquilibres.
     
    Geneviève a aussi rencontré Andrée Chedid, devant qui nous avons dit le poème "Il y aura ceux qui s'aiment"(7). Ce texte montre à lui seul la manière dont nous disons ensemble. J'écrirai bientôt une Lettre d'un colporteur-liseur où j'en dirai quelques mots. (8)
     
    Un autre poème d'Andrée Chedid résonne chez Geneviève : "Femmes de tous les temps".

    Femmes de tous les temps
    Ancestrales et pourtant fraternelles
    Lointaines et pourtant proches
     
    Elles viennent à notre rencontre
    Ces Femmes d’un autre âge
     
    Dans la pulpe éphémère de leurs corps
    Dans la beauté d’un geste périssable
    Dans les brefs remous d’un visage neuf ou vieilli
     
    Ces Femmes immémoriales
    à travers argile et pierres
    écartant les écorces du temps
    Se frayent passage jusqu’ici.
     
    Hors du tréfonds des siècles
    délivrant l’esprit
     
    Non plus femmes - objets
    Mais objets devenus Femmes
     
    Elles lèvent échos paroles
    et questions d’aujourd’hui. (9)
     
    Un feu entre femmes nous parvient à travers les âges. C'est pour cela que la rencontre de Geneviève et Josette Duc ne m'a pas surpris.
     
    D'autres poètes l'ont aidée à avancer, à parfaire son écriture, à aller vers d'autres horizons.
    Il y a François Cheng, cet émigrant qui choisit la France pour sa langue et qui est devenu académicien. C'est l'un de nos grands poètes. Geneviève a correspondu avec lui lors de la sortie de son recueil Un caillou qui pense oiseau. François Cheng est un poète transcendant, présent dans les infimes choses de la vie. À l'esprit et au corps, il ajoute l'âme, ce fil qui relie toutes choses dans l'univers, y compris nous. Ses mots, leur musique, leur graphie, leur marche, nous entrainent et nous rendent la joie des origines. On tient ses mots comme on tient un attelage céleste.
     
    Geneviève est assez réservée. Ce n'est pas elle qui fera un grand discours pour amuser la galerie. Ça ne l'empêche pas de s'enthousiasmer pour un livre, un auteur. Le dernier est Roger-Paul Droit, avec son "Comment marchent les philosophes".
     
    Pour Geneviève, l'écrit, c'est la vie. Elle le disait déjà dans son premier recueil "Basalte" :
     
    Je dérive sur des heures ignorantes
    je respire au jour le jour
    et mon crayon fou
    rêve de mistral
    parle de miel roux.
    Mais je n'y suis pour personne
    j'écris pour faire semblant de vivre
    je vis parce que j'écris.
    Je ne suis qu'un caillou qui suinte
    Un caillou qui pense oiseau
    et qui parle caillou.
     
    Voici la femme qui a écrit "D'Azur et feu".
    Cet azur et ce feu, ce sont aussi elle

    (1) - Un caillou qui pense oiseau. L'Autre incertain Editeur, 2017.
    (2) Un livre à la mer. Récit paru en 2003 aux Editions Marsa.
    (3)  "Jabbaren", tiré de Un caillou qui pense oiseau. 
    (4) "Sérénité", tiré de Basalte, Edition La Coïncidence, Guy Chambelland. Librairie Pont de l'Epée, 1982.
    (5)  L'appel du sud, roman, Edition Marsa - Najib, l'enfant de la nuit, L'Harmattan jeunesse - Un livre à la mer, Edition Marsa.
    (6)  Météorites, Editions Supervie, 1987.
    (7)  Tiré de Textes pour un poème, 1949-1970. Andrée Chedid, Editions Flammarion.
    (8)  Depuis mars 2020, ne pouvant plus donner de lectures de poésie de vive voix, j'adresse de temps à autre, par courriel, des Lettres d'un colporteur-liseur directement à des personnes, comme si je leur donnais un texte à l'oreille. Quelques mots et des textes de poètes, de ces hommes ou de ces femmes volants pour qui le temps ne compte pas et qui savent avant l'heure. Les lettres sont également sur le blog : http://briot-cohenaknin.hautetfort.com.
    (9)  "Femmes de tous les temps" - Fraternité de la Parole. Andrée Chedid. 

  • Il y aura ceux qui s'aiment

    Lettre d'un colporteur-liseur N° 26
    "Il y aura ceux qui s'aiment" de André Cohen Aknin
    Poèmes cités : Il y aura ceux qui s'aiment et Jeunesse d'Andrée Chedid. 

    La salle des fêtes d'un village près de Montélimar. Aucun projecteur. Les spectateurs sont une cinquantaine. Nous sommes loin des pays d'Orient où la poésie attire la foule. Nous échauffons nos voix et répétons les enchaînements, car rien n'est acquis dans la diction d'un poème, chaque lecture peut vous mener à la joie ou au précipice.
     
    *
     
    Cela commence par un silence. 
    Les mains le long du corps attendent le frémissement qui irradie les bras puis le haut du torse, provoque un léger tremblement. 
    C'est le signal.
    Une voix se fait entendre, claire, cadencée, celle d'un d'homme. Tout est là dans les deux premiers vers. La voix retient son souffle, puis roule sans arrêt sur le chemin de pierres que sont les italiques ; elle parle de temps, d'année après année et d'oliviers mangés de soleil et de patience.
    Il se tient à la porte. 
    Survient la voix d'une femme, sobre, lumineuse. 
    Ils pourraient se tenir côte à côte, profiter de la présence de l'autre. Mais il est pressé, il veut prendre sa place. Sa place ! lance-t-il.
    Elle acquiesce en écho : oui, prendre sa place. 
    Ils passent d'une voix à l'autre, d'une voix dans l'autre. Un fil de soie les relie, d'un noir insaisissable, celui des peintres pour qui le noir flamboie, modifie l'espace, ouvre une porte vers l'indicible.
    Elle s'inquiète pour ceux qui s'aiment. 
    On entend le hurlement de loups, le cri âcre des méfiants. On ressent la fièvre.
    C'est elle qui dit la première le cri qui fait trembler les murs. Le cri pour protéger ceux qui s'aiment. Ses éclats sont des flèches qui repoussent les corps ennemis.
    Il retient sa voix en contre-chant. Il aurait pourtant envie d'appuyer chacune des syllabes, "à cause de la vie, à cause de la mort", avec en tête l'écriture et le néant. Il ne la quitte pas des yeux, elle qui s'inquiète. Ceux qui s'aiment sont en danger, qu'il soient d'ici ou d'ailleurs, de Bali, de Vancouver, des steppes de Mongolie, de Sydney, de Dakar la rouge ou du Caire dont les murs gardent le souvenir d'Andrée Chedid, l'auteure du poème.
    À son tour, il dit :
    J'ai crié, j'ai chanté.
    Le chant est là qui les entoure d'un voile. Leurs yeux pétillent, alors qu'ils se rapprochent et que leurs voix s'unissent au dernier vers. 
    Bientôt, ce sera au tour de leurs mains, de leur corps tout entier. Flammes épanouies. Ils ne se chercheront plus.
     
    Il y aura ceux qui s'aiment
    Debout devant ma porte je les attends
     
    Il y en a qui veillent année après année
    Comme des oliviers mangés de soleil et de patience
     
    Moi j'ai franchi le seuil je guette la route
    Et je sais qu'ils viendront
     
    Dans la maison les appels se nouent
    "C'est assez d'attendre
    Il faut prendre sa place
    Comme les autres comme les autres
    Autour d'une table de bois
    Il faut prendre sa place
    La vie est comme cela
    Grain de sable
    Or qui tinte
    Fil de soie"
     
    Ensuite celle qui m'habite comme une prune trop ridée
    A dit "J'ai peur pour ceux qui s'aiment
    Quelle menace portent-t-ils au cœur l'un pour l'autre"
     
    Elle a dit "J'ai peur pour ceux qui s'aiment
    Le cri âcre des méfiants les tourmente
    La voix cuivrée des loups
    L'envie avec ses lèvres de malade"
     
     
    Mais j'ai crié plus fort que l'emmurée
    Pour ceux qui n'ont eu que les songes j'ai crié
    Pour ceux qui n'ont que le jeu
    Pour cette tour où l'écho se fracasse 
    Aux murs ronds de la solitude
    Pour le silence des mal-aimés
    Enfoui en lui-même comme en un puits
     
    À cause de la vie          à cause de la mort
    J'ai crié plus fort que l'emmurée
     
     
    J'ai crié
    "Avant que les villes ne s'écroulent
    Avant que l'ombre des arbres ne traverse
    Le fleuve comme des cordes
    Aussi sûr que le soleil et sa mort se défient
    Il y aura ceux qui s'aiment 
    Et je ne me chercherai plus"
     
    J'ai crié j'ai chanté
    "La magie à leur doigt
    Dans leurs veines des rivières de fête
    Ils iront intouchés comme des rois de nulle part
    Leurs regards se croiseront au-dessus des voix"
     
    J'ai crié j'ai chanté
    Et devant la maison il y avait eux et moi (1)
     
    *
     
    "Il y aura ceux qui s'aiment" est un poème emblématique pour Geneviève et moi. Un texte où nos voix vibrent en échos, se chevauchent, en appels, les yeux ouverts sur des pages couvertes de signes, à la manière d’une partition de musique. 
    Chaque syllabe est une caresse. 
    Chaque phrase, un corps qui se courbe.
    Nous donnons ce texte comme si nous partagions une pomme d'amour, le croquant à l'extérieur et la douceur légèrement acidulée en dedans. 
    En le lisant, nous sommes dix, vingt, trente, mille.
    Mille, comme le titre de notre première lecture "Le monde a mille voix". Nous ne savions pas, alors, jusqu'où la voix pouvait nous mener.
    Une vibration de chaque instant.
    Un lien avec celui ou celle qui nous accompagne, des musiciens parfois.
    Un lien avec ceux qui nous écoutent. N'est-ce pas le plus important ?
    Il arrive qu'un auteur nous apparaisse en songe. 
    Le jour de notre rencontre avec Andrée Chedid fut un enchantement. Il fallait entendre la voix de cette femme, légère et si puissante. Elle nous demandait de rester des hommes et des femmes libres, fiers de nos origines, de ce que nous sommes, de nos langues. Son écriture est un appel au dépassement, à la vie. Son "Appel à la jeunesse" en témoigne : 
     
    Tous les appels du monde 
    te traversent jeunesse !
     
    Tu enfantes le feu (2)
     
    Si sa poésie peut être un acte de fureur, à l'instar de celle de René Char, elle est avant tout un acte d'amour. Elle a peur pour ceux qui s'aiment. 
    Moi aussi, j'ai peur pour ceux qui s'aiment. J'ai griffonné les premiers mots de cette lettre au printemps dernier, en pensant à ceux et à celles que le confinement éloignait.
     
    (1) "Il y aura ceux qui s'aiment" - Textes pour le vivant, 1953 - Textes pour un poème (1949 - 1970). Andrée Chedid. Editions Flammarion.
    (2) "Jeunesse" - Poème pour un texte (1970 - 1991). Andrée Chedid. Editions Flammarion.
  • Mon livre pèse

    Lettre d'un colporteur-liseur N° 23
    "Mon livre pèse" de André Cohen Aknin
    Poèmes cités : Sur la robe elle a une corps et  Tu es plus belle que le ciel et la mer de Blaise Cendrars
     
    Ce matin, mon boucher a soupesé mon steak avant de le jeter sur la balance. Il annonce 200 grammes tout rond. La balance lui donne raison. Un fortiche mon boucher ! Suis-je capable d'en faire autant ? Combien pèse le livre que je suis en train de lire ? Environ une livre. Drôle ça, un livre d'une livre ! Peser est chez moi une marotte. Quand j'habitais dans le Nord et que le charbonnier vidait ses grands sacs de boulets dans ma cave, je me demandais combien chacun pouvait peser. Cinquante kilos et plus. À la fin, je nous servais ce que j'avais sous la main. Je me souviens d'un pâté de grives et d'un Muscadet pas piqué des hannetons. 
    Question poids, il y a quelqu'un qui s'y connaissait : Blaise Cendrars. Cet homme avait une conscience profonde des corps, de leur enveloppe, de leurs mouvements, de ce qu'ils dégagent. Il écrit dans Sur la robe elle a un corps :
     Mes yeux sont des kilos qui pèsent la sensualité des femmes (1)
        Et dans Tu es plus belle que le ciel et la mer :
    Je sors de la pharmacie
    Je descends juste de la bascule
    Je pèse mes 80 kilos
    Je t'aime. (2)
        Tout se pèse.
        Tenez, prenez la poésie d'Alain Borne, une poésie de lumière et de désir, jusqu'à la brûlure. Eh bien, elle me laisse en bouche un goût d'amande caramélisée ; et les amandes, on en achète une grosse poignée, 250 - 300g. Les mots de Léopold Sédar Senghor dégagent, quant à eux, une impression de chocolat noir légèrement amer ; ils ont été nourris du chant de Marône la poétesse de son village - une tablette par lecture. Il y a aussi cette terre rouge du Sénégal emportée sous les ongles des esclaves passés par l'île de Gorée ; ça fait quoi 1-2 grammes qu'on multiplie par le nombre d'hommes, de femmes et d'enfants par traversée, à raison de tant de traversées par an, pendant des dizaines et des dizaines d'années… Chez Barjavel, j'entends le bruit du plateau de la balance quand le boulanger pèse ses pâtons. Je mange à mon petit-déjeuner un quart de baguette, pas plus, soit 50 grammes environ. Avec Andrée Chedid, on aperçoit des kilos d'étoiles, même en plein jour. À première vue, les ellipses d'André du Bouchet laissent un lecteur perplexe, mais avec le temps, elles valent leur pesant de cacahouètes ; et je m'y connais en cacahouètes, j'en ai récolté des journées entières. Pessoa, lui, laisse une toute autre impression, il vous fait comprendre que vous n'êtes qu'une pierre qu'on lance en l'air. Elle pèse combien celle qu'on glisse dans un lance-pierre ? 
     
        Il y a autre chose qui pèse, eh sacrement en plus ! Ce sont les envies. Je me souviens d'une envie de livre, un album de Tintin, qui appartenait à Germain, un camarade de classe, un patos qu'on disait en Algérie. Je n'en avais jamais lu. Il m'avait fallu négocier d'arrache-pied pour pouvoir le lire à la récréation. Ça m'avait coûté un Blek le roc, deux agates et j'ai dû laisser Germain jouer avec mon boulard de verre qui, quand on le lançait, donnait l'impression de tout dévaster sur son passage. Il pesait quoi mon boulard, 50 grammes peut-être.
     
        J'ai assisté à une vente de livres au poids. Étrange, comme impression. Il y certes le poids réel du papier et du carton, le poids des mots, c'est-à-dire leur impact. Mais a-t-on déjà calculé le ratio entre le poids physique d'un auteur et le nombre de mots qu'il a écrit ? Dans ce cas, quelle valeur donner à ce résultat ? À mon avis, la seule balance qui compte est la relation intime entre l'auteur et le lecteur. Et ça, ça n'a pas de poids. On dit aussi : ça n'a pas de prix. Mais, c'est une autre histoire…
    Le corps de la femme est aussi bosselé que mon crâne
    Glorieuse
    Si tu t'incarnes avec esprit
    Les couturiers font un sot métier
    Autant que la phrénologie
    Mes yeux sont des kilos qui pèsent la sensualité des femmes
    Tout ce qui fuit, saille avance dans la profondeur
    Les étoiles creusent le ciel
    Les couleurs déshabillent
    "Sur la robe, elle a un corps"
    Sous les bras des bruyères mains lunules et pistils
    quand les eaux se déversent dans le dos avec les 
    omoplates glauques
    Le ventre un disque qui bouge
    La double coque des seins passe sous le pont des arcs-en-ciel
    Ventre
    Disque
    Soleil
    Les cris perpendiculaires des couleurs tombent sur les cuisses
     
    ÉPÉE DE SAINT MICHEL
     
    Il y a des mains qui se tendent
    Il y a dans la traîne la bête tous les yeux toutes les fanfares 
    tous les habitués du bal Bullier
    Et sur la hanche
    La signature du poète (1)
     
    (1) Blaise Cendras. Sur la robe elle a un corps. Février 1914. Tiré de "Dix-neuf poèmes élastiques". Editeurs : Denoël, puis Gallimard. - (2) Blaise Cendrars. Tu es plus belle que le ciel et la mer. Extrait.

  • Lueur

    L'homme périt de son propre venin

    Mais s'élève dans la lueur qu'il esquisse

     

    C'est ce que nous dit Andrée Chedid (1), une femme qui s'est nourrie de rencontres à travers l'Egypte, le pays de sa naissance, le Liban, puis la France. Elle a su être à l'écoute des hommes et des femmes ; elle a aimé leurs langues, s'est délectée de chaque coin de rue, de chaque bout de terre, de chaque voyelle. Ses écrits, romans - nouvelles - poésie, révèlent son talent et sa générosité ; ils nous disent combien les épreuves et la souffrance sont présentes, mais aussi qu'il y a une lumière et qu'elle est à notre portée, parce qu'elle est en NOUS !

     

    Eveille en toi l'autre regard !

    Celui qui transgresse le monde

    Et distance le monde singulier (2)

     

    Dans un autre poème, elle nous dit encore :

    Nous jouons l'existence 

    Contre un décor

    qui fuit

     

    Ils meurent nos vieux soleils

    Ils meurent pour mieux renaître ! (3)

     

    Nous sommes heureux, Geneviève et moi, d'avoir rencontré cette dame attentive aux autres, d'avoir ressenti son énergie, sa chaleur humaine, d’avoir donné sa poésie en public. Sa vibration est toujours présente.

    Andrée Chedid, “Poèmes pour un texte” (1970-1991). Ed. Flammarion. Extraits de 1) Le mouvement p.63 - 2) L'autre regard p.51 - 3) Pour renaître p. 65

    André Cohen Aknin (AAKC)

    Lettre d'un colporteur-liseur N° 2

  • Hors les murs - interview

    Dimanche 15 septembre, nous avons eu le plaisir de participer à “Hors les murs”, un événement organisé par Radio Méga et le village de Geyssans. Lors d’une interview, nous avons pu rappeler notre démarche poétique et dire quelques poèmes. Nous avons ensuite échangé au long de l'après-midi avec des visiteurs et même dit des textes à l'oreille…

    Radio Mega - André 15 sept 2019.jpg

     

    Interview :
    podcast

  • Femmes immémoriales

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        Dans le parcours permanent du musée, un domaine m’intéresse particulièrement : "Origines, les récits du monde". Il y a là une présentation et des traces laissées par le vivant depuis des millénaires, des signes ancestraux inscrits dans la pierre, sur le sable, sur l’écorce d'arbres. J'ai le sentiment, aujourd'hui, que c'est dans ces signes lointains que je dois puiser pour mon travail « encre et écriture ».
        A l’entrée de la première salle, trois femmes de cire accueillent les visiteurs. Leurs regards embrassent l’enfant en nous. L’une mesure 1.20m et les autres 1.60m à peu près. Elles ont 18000, 20600 et 36300 ans. La première est "Femme Florès", ses mains descendent au-dessous du genou, ses pieds sont immenses au regard de sa taille ; la seconde se nomme "Femme Sapiens" et la troisième "Femme Néandertalienne". On a beau avoir des connaissances sur l’évolution humaine, on est frappé par la rencontre.
        Ces femmes nous ressemblent. J’ai devant moi ma mère, ma grand-mère, mes tantes et bien d’autres femmes. Leurs visages sont semblables à ceux qu’on trouve en Alaska, en Sibérie, à Mogadiscio, dans les steppes de Mongolie, dans les forêts de Bornéo ou dans le désert du Sahara, ou même à Manhattan et à Berlin. Elles appartiennent à ces femmes immémoriales qui se rappellent à nous à travers le temps, tout comme "Lucy" qui ouvre la voie à l’humanité et qu’Andrée Chedid interpelle filialement dans "Lucy, la femme verticale" (Éd. Flammarion).     
        Cette romancière et poète a su évoquer ces femmes dont nous sommes issus. Quand je l’ai rencontrée en 1999, elle avait un visage plein de vivacité et de lumière. J’ai été enchanté. Je le suis toujours. La lire, c’est frotter ses mains sur une planche à laver posée sur la margelle d’un lavoir ou sur une pierre polie par l’écume d’un cours d’eau. La lire, c’est parler de l’enfance et de l’enfance de l’enfance. La lire, c’est entendre les voix ancestrales.
        Voici le poème d'Andrée Chedid "Femmes de tous les temps", tiré de "Fraternité de la parole", Éd Flammarion.

    Ancestrales et pourtant fraternelles
    Lointaines et pourtant proches

    Elles viennent à notre rencontre
    Ces Femmes d’un autre âge

    Dans la pulpe éphémère de leur corps
    Dans la beauté d’un geste périssable
    Dans les brefs remous d’un visage neuf ou vieilli

    Ces femmes immémoriales
            à travers argile et pierres
            écartant les écorces du temps
    Se frayent passage jusqu’ici.

    Musée des Confluences, Lyon, le 12 septembre 2017
    André

  • Printemps en poésie

    - Le 12 mars de 10h à 17h, à la librairie Clareton des Sources à Béziers. Dans le cadre d'une "carte blanche" donnée à l'éditeur Stéphane Landois - Atelier du Hanneton - les auteurs André Cohen Aknin et Monique Domergue donneront des lectures poétiques.

    - le 19 mars de 10h à 17h, à la Médiathèque de Crest (Drôme), André Cohen Aknin donnera des lectures dans le cadre d'un atelier créatif mené par l'éditeur-typographe Stéphane Landois.

    - Le 19 mars à 16 h, Naïs de l'Association Bleu 31 présentera dans le cadre du Festival de Mirmande (Drôme) une lecture intitulée "Dans ma maison vous viendrez". Dans la composition élaborée par Naïs, différents poètes parlent de cet espace d'intimité capable de s'ouvrir aux autres.

    "Il y aura ceux qui s'aiment / Debout devant ma porte je les attends" Andrée Chedid

    Infos sur https://www.facebook.fr/MaisondelaPoesiedelaDrome

    Pour le Printemps des poètes 2016, on peut consulter le site : http://www.printempsdespoetes.com/. On peut aussi consulter les rubriques "Apologie des poètes" dans lesquelles des auteurs d'aujourd'hui parlent de leurs coups de cœur pour des poètes du XXe siècle (thème de cette année) : Alain Borne par Geneviève Briot, Aimé Césaire par Cécile Oumhani, Hélène Cadou par Nicole et G. Drano etc. Plus de cent poètes sont évoqués.

    Célébrons la poésie et évoquons le poète d'origine palestinienne, Achraf Fayad condamné à mort pour apostasie en novembre 2015 en Arabie Saoudite. Devant l'émotion suscitée dans le monde, sa peine a été commuée en février 2016 en une sentence de huit ans de prison et de huit cents coups de fouet !

    Nous relayons les mots de Tahar Ben Jelloun qui écrit : "Les poètes sont des insurgés, porteurs de feu, compagnons de la vérité et de l’évidence. Ils sont la lumière qui éteint les ténèbres et donne les mots aux choses qui meurent de ne pas être dites. Ils sont fragiles et forts à la fois. Ils ne possèdent que leur souffle et leur âme qui résistent. On peut les frapper, les fouetter, les jeter au fond d’un puits, les enterrer vivants, leur voix continue de s’élever et réveille le monde. Les tribunaux les détestent. Les États les craignent. L’ordre les poursuit et les persécute. Les religions s’en méfient et les dénoncent. Mais ce sont les poètes qui donnent à la terre son sel, son grain de folie, sa musique et ses songes. La poésie ne peut être que fulgurance, clarté, doute et "intranquillité".

  • Théâtre à Clérieux - Drôme

    Nous vous communiquons le programme du Festival Théâtre Automne que nous avons le plaisir de parrainer.

    Festival Théâtre Automne

    Salle des fêtes de Clérieux Drôme

    les 23 24 25 octobre 2015 

    • vendredi 20h30 - comédie "Au rendez-vous des autres" par le Théâtre inattendu de Sauzet 

    samedi 10h30 - rencontre d'auteurs Geneviève Briot et André Cohen Aknin sont auteurs de théâtre, de poésies et de romans. Ils sont Drômois, mais pas seulement. leurs vies sont marquées par le voyage. Ils viennent en voisins se présenter à nous. 

    • samedi 16h - comédie dramatique "Échec à la reine" d'Andrée Chedid par les Zygomatics de Valence 

    samedi 20h30 - comédie dramatique "L'Atelier" de Jean-Claude Grumberg par le Théâtre d'en Face d'Annonay

    • dimanche 11h - Apéro spectacle. Temps convivial animé par les troupes du CD 26

    • dimanche 15h - comédie absurde "Le spectateur condamné à mort" de Matei Visniek par le Théâtre de la Grille verte de St Étienne

    tarifs :10 € - réduit : 6 € - Pass : 15 €

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