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Citations - Page 8

  • Un silence voyageur

    Cet été il a fait si chaud que j’avais l’impression que le ciel avait sorti son immense fer à repasser, au point qu’il a brûlé les feuilles des arbres qui se croient maintenant en automne et s’envolent au moindre souffle d’air.

    Pour échapper à cette chaleur excessive, je suis souvent restée derrière les volets mi-clos. Là je fais le vide, j’enlève les décors. Le vide, je le repeins en blanc pour pouvoir accueillir le moment venu. Accueillir quoi ? Ce que je n’attends pas. Ne pas écouter les rumeurs des histoires ébauchées prêtes à bondir sur la page. Laisser le silence m’envahir. Non pas un « turbulent silence » mais un silence qui repousse les murs, qui erre sur des chemins perdus. Rester dans le vide, se laisser flotter, boire le déséquilibre. Jouir et souffrir du rien jusqu’à ne plus rien ressentir.

    « J’écoute le silence, écrit Mahmoud Darwich. Si… nous tendions l’oreille, nous entendrions les voix des âmes errantes dans les airs et les cris de ceux qui ont trouvé le chemin des premières cavernes. Le silence est une voix qui s’est évaporée, cachée dans le vent et brisée en échos conservés dans des jarres cosmiques » Ce n’est pas un hasard si je lis ces mots en ce moment, ces mots tirés de « La trace du papillon ».

    La poésie seule donne liberté espace. La poésie ne pense pas, elle vibre d’inconnu.

    Geneviève

  • Sourire de l'absente

     

     

    Je travaille sur un nouveau texte dont le titre est "Sourire de l'absente". Il reprend quelques écrits de 2006 présentés lors de l’exposition "31 minutes" et chemine plus avant dans une écriture toute en mouvement où la "ponctuation appartient de nouveau au mot son ventre". En voici un extrait : 

    "au féminin changement de tonalité l’écriture devient fugue et les voyelles se transforment en signes se mêlent au rythme des tambours au tempo de prendre le pas sur la ponctuation il n’y pas de majuscule en musique suite de hautbois violoncelle clap clap au micro le rap s’affiche dans les revues de poésie les plus chics on parlera longtemps du noir à cause du chant je ne parle pas d’harmonie juste du bourdonnement de la forêt des os"

    André

  • Les enfants ont des soucis

    P1050521.JPGAprès la rencontre avec mes jeunes lecteurs (6e du Collège Étienne Lapassat à Romans) lors du Salon du Livre Jeunesse de Châtillon St Jean, un thème d'écriture leur a été proposé à partir du roman « Najib l’enfant de la nuit ». Les enfants pouvaient écrire en leur propre nom à l’un des héros du livre pour parler de leur souci ou se substituer à l’un des personnages. Il est remarquable qu’ils ont souvent intégré les éléments de l’histoire pour la continuer  par une lettre de Najib à Pilou, ou de Pilou à Najib, les deux amis au centre de l’intrigue, tout en y introduisant leur propre souci. Parfois, ils allaient chercher inspiration chez les personnages secondaires, Simon, Meriem ou même Juliette à peine entrevue dans le roman. L’un d’eux a même imaginé qu’il avait vu Najib sur la place du village alors qu’il s’y était arrêté lors d’une randonnée à vélo. Ils ont montré une connaissance du livre qui m’a impressionnée et je pense que l‘approche pédagogique de leur professeur y est pour beaucoup. Le projet d'écriture portait aussi sur le brouillon, son évolution jusqu'au texte définitif.

    Leurs soucis ? Divorce des parents, solitude, moquerie, difficultés à l’école, racisme, mésentente avec les parents, décès d’un proche, problème de drogue pour un membre de la famille, disputes avec des copains.

    Extraits de lettres : « Maintenant, je vais te parler de mon problème : j’aime quelqu’un qui ne m’aime pas »

     « Chère Meriem, Je suis triste, tu me manques énormément, c’était super de jouer Slimane avec toi qui étais la princesse. À l’école, je n’ai pas tellement d’amis. Ils me rejettent, disent que je suis idiot parce que je suis nul à l’école ! Mes seuls amis, c’est vous »

    « Cher Simon, …Meriem m’a dit qu’on peut te confier tous les secrets, donc j’ai décidé de te parler du mien. Je voulais te parler d’un petit souci : mes parents sont en plein divorce, moi je suis au milieu de tout ça. On ne peut plus manger ensemble, chacun est de son côté. Et aussi, maman va déménager, je vais partir avec elle, partir loin d’ici. Je vais perdre touts mes amis et tous les week-ends, je devrai aller chez mon papa. Je devrai changer d’école… et je ne peux rien dire, je ne peux que supporter les cris de mes parents. J’ai peur et j’ai besoin de toi et de ton soutien. »

    Les lettres sont actuellement exposées à la Médiathèque de La Monnaie à Romans. Les  bibliothécaires, Patricia, Isa et  Lila sont à l’origine du projet avec Rachel Mandon, documentaliste dynamique et attentive et leur professeur Jacquie Grimaldi. L’engagement des élèves vient aussi de l’implication des adultes autour d’eux qui ont créé un climat de confiance. La présence chaleureuse de Jean René Perchet Principal du Collège lors de l’exposition des lettres à la Médiathèque a aussi valorisé le travail de tous. 

     

     

  • Le village de l'Allemand

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    « Plus on se prépare dans la vie, moins on est prêt » écrit dans son journal Rachid Helmut, né de père allemand et de mère algérienne, devenu par la contraction de ses prénoms Rachel. Le jeune ingénieur qui vit en France ne s’attendait pas à l’héritage qui lui échoit à la mort de ses parents en Algérie, victimes du GIA.

    Boualem Sensal a l’habileté de nous faire vivre ou revivre, à la fois « la sale guerre » des années 90 en Algérie, la Shoah vue par un jeune Arabe et la situation d’une banlieue française investie par les islamistes. Le journal de Rachel se double de celui de son jeune frère Malrich (Malek Ulrich) qui découvre la tragédie vécue par son aîné. Ce roman d’une grande intensité est fondé sur une histoire authentique, nous dit la quatrième de couverture. À travers cette histoire, l'auteur entraîne le lecteur dans sa réflexion qui s’appuie sur la pensée de Primo Levi. Il fait le procès du silence qui engendre les ombres.

    « Les enfants ne savent pas / Ils vivent, ils jouent, ils aiment. / Et quand ce qui fut vient à eux, / Les drames légués par les parents, / Ils sont devant des questions étranges, / Des silences glacés, / Et des ombres sans nom. / Ma maison s’est écroulée et la peine m’accable, / Et je ne sais pas pourquoi / Mon père ne m’a rien dit. » (Boualem Sensal)

  • Terre d'enfance

    « Il est un arbre

    qui résiste à tous les vents

    C’est l’arbre d’enfance

    Ses racines creusent

    la terre des ancêtres

    Au bord du vert

    ses branches retiennent

    dans son feuillage

    le chuchotement de l’invisible. »

    Joseph Paul Schneider

    Après des activités d’écritures avec des adolescents au cours de l’hiver, avec le printemps je reviens en terre d’enfance à l’occasion du Salon du Livre Jeunesse à Châtillon St Jean (Drôme), du 23 au 28 mars.

    - Le 23 mars, je rencontrerai des classes pour répondre à leurs questions à propos de mes ouvrages : « L’ogre aux pieds nus » (Ed. Chardon bleu), « Histoire d’éléphant » (Ed. Grandir) et  « Najib l’enfant de la nuit » (Ed. L’Harmattan Jeunesse Ed.). Nous parlerons aussi du lien entre le réel et l’imaginaire.

    - Le samedi 28, avec d’autres auteurs et illustrateurs, je participerai au Salon ouvert au public.

    Geneviève

    Informations sur le Salon du Livre Jeunesse à Châtillon St Jean : Signatures et spectacles sont prévus tout au long de la semaine. 

    http://www.ac-grenoble.fr/ecole/chatillon.st-jean/ecole-salon2009.html

    Tél. mairie :  04 75 45 31 15 - Tél. école : 04 75 71 41 41

  • D'Aimé Césaire à Daniel Maximin

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    Ce matin, lever de soleil, je pense à la Guadeloupe. J'ai envie de rendre hommage aux Guadeloupéens qui se battent pour plus de justice dans ces terres lointaines auréolées de la voix d'Aimé Césaire. Il y a soixante-dix ans, dans "Cahier d'un retour au pays natal", il écrivait : "Et nous sommes debout maintenant, mon pays et moi, les cheveux dans le vent, ma main petite maintenant dans son poing énorme et la force n'est pas en nous, mais au-dessus de nous, dans une voix qui vrille la nuit... Et la voix prononce que l'Europe nous a pendant des siècles gavés de mensonges et de pestilences, car il n'est pas vrai ... que nous n'avons rien à faire au monde, qu'il suffit que nous nous mettions au pas du monde, mais l'œuvre de l'homme vient seulement de commencer et il reste à l'homme à conquérir toute interdiction immobilisée aux coins de sa ferveur ..."

    C’est cette ferveur que je trouve dans « Soufrières » de Daniel Maximin, des mots de terre et de feu, une vibration qui épouse les tremblements volcaniques, une intériorité nourrie du « lait du feu ». Marie-Gabriel qui héberge la jeune Élisa devenue muette depuis que son petit frère est mort ne lui dit-elle pas  : « Fais confiance à ta fragilité. » C’est une phrase qui m’a portée parfois quand j’avais à affronter des choses qui me dépassaient. Élisa est un beau personnage qui a l’intelligence des sens. Il y a aussi dans ce roman une amplitude dans la vision, une relation avec les vivants et les disparus, avec l'univers, et c'est tellement opposé à la vision individualiste de la métropole.

    « Souviens-toi du poème, souviens-toi de sa musique, ceux qui sont morts ne sont jamais partis, ils sont la voix du feu, de l'eau, de l'herbe, du souffle, de l'ombre, de l'arbre, du vent et du buisson. »

    Geneviève

  • Les mots qu'il faut

    Dans la tourmente et devant la folie des hommes, nous écoutons les poètes qui ont toujours les mots qu'il faut.

    "A force de parler d'amour
    vous sentirez à vos lèvres ce mot
    comme de la neige
    plutôt que du sang."

    Alain Borne

  • Pierre de patience

    Invitation à la lecture de Atiq Rahimi. Cet auteur afghan vient d’obtenir le prix Goncourt pour «Syngue sabour» Ed. P.O.L. Ce titre vient du perse syngue « pierre » et sabour  « patience ».
    Singue sabour veut dire pierre de patience. Dans la mythologie perse, il s’agit d’une pierre magique que l’on pose devant soi pour déverser sur elle ses malheurs, ses souffrances, ses douleurs, ses misères… On lui confie tout ce que l’on n’ose pas révéler aux autres… Et la pierre écoute, absorbe comme une éponge tous les mots, tous les secrets jusqu’à ce beau jour où elle éclate… Et ce jour-là, on est délivré. (4e de couverture)
    Cet auteur dit aussi :
    «Je suis bouddhiste parce que je suis conscient de mes faiblesses ; je suis chrétien parce que j'avoue ma faiblesse ; je suis juif parce que je me moque de ma faiblesse ; je suis musulman parce que je combats ma faiblesse. Et je suis athée si Dieu est tout puissant».
    Phrase de Atiq Rahimi citée par Ariane Chemin dans Le Nouvel Observateur.
    Je n’ai pas encore lu cet auteur, mais les quelques commentaires lus ça et là sont pour moi une invitation à la lecture. Et pour vous ?

    Geneviève

  • Terre de l'été

    Il y a une soixantaine d'années, le poète Alain Borne écrivait les poèmes qui composent "Terre de l'été". Je l'imagine aux heures chaudes à l'ombre des persiennes dans sa maison de Montélimar évoquer la brûlure de l'été et de l'émoi amoureux.
    En voici quelques extraits :

    "Août
    le vent de flammes
    sur l'enclume blanche,
    et tout le ciel n'est que marteaux.
    ……………
    Le soleil imite l'amour
    et pèse sa lente brûlure
    aux balances d'un corps renversé
    ……………
    Pour quatre lèvres
    une soif unique
    chemine chemine
    cheval de soleil
    ……………
    Sous sa robe blanche
    ma compagne est nue
    jambe de soleil,
    corsage de lait
    sang visité d'eau
    il reste une source
    où le ciel est tiède
    et où l'aube reste
    sous le grand midi,
    il reste un peu d'ombre,
    un dernier cyprès
    sur le feu de la route,
    un pétale de neige
    sur tout ce fer rouge,
    ma compagne est nue
    sous sa robe blanche
    chemine, chemine,
    cheval de myrte.

    Pour quatre lèvres
    une soif unique
    chemine chemine
    cheval d'éveil"