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juifs d'algérie

  • Renoncement

    Créer et préparer cette rencontre "Juifs d'Algérie, une mémoire qui (en)chante" a été une joie, une joie de travailler avec Michel Wilson et l'association Coup de Soleil.

    Une joie de plonger dans la poésie d'une "Algérie plurielle" dont parle Kamel Daoud. Etre juif d'Algérie, c'est parler d'une terre, de ses habitants, de sa culture, ses coutumes, ses rites, ses langues, ses chants, sa musique et du lien avec ceux qu'ils côtoient. Eviter l'enfermement. La richesse de l'un est la richesse de l'autre. Aller "au-delà de la haine", nous dit le poète Souhel Did. Il ajoute :
    "S’aimer dans le creux de la différence,
    ça doit être l’horizon sous lequel il faut survivre.
    Même à notre insu.
    A l'insu de la différence."

    La joie des auteurs de travailler ensemble. Marie-Claude, Simone et Geneviève ont construit une lecture croisée de leurs livres, à l'écoute l'une de l'autre, se mettant en jeu, elles-mêmes.
    Les auteurs mettent leur vie sur la table, leur histoire, leur histoire traumatique aussi, qui n'est pas faite que d'exils, mais aussi de "dévastation" et de "disparition". Ils ont besoin d'un accueil de la parole et d'une écoute.
    Nous vous renvoyons à nos livres. 
    "L'enfant qui se taisait", de Marie-Claude Akiba Egry, Editions Gallimard
    "Voile blanche sur fond d'écran" de Simone Molina, Editions La tête à l'envers
    "Un livre à la mer" de Geneviève Briot, Editions Marsa
    "Un lit dans l'océan" de André Cohen Aknin, Editions Parole

    J'ai préparé de mon côté une lecture de mon roman en faisant émerger l'importance de la nourriture chez les juifs d'Algérie. Histoire de mettre en appétit. Je l'ai pensée avec de la musique.
    Ma mère est l'une de ces femmes juives d'Algérie qui parlent, écrivent avec leur cuisine d’où s’élève le parfum des épices. Chaque plat est une page sur laquelle s’inscrit une prière. Sous ses mains, les grains de semoule parlent du désert, des chamelles, du quartier, des cris des enfants et du joueur de flûte sous un ciel étoilé.

    Joie encore de construire la première lecture avec les colporteurs-liseurs Naïs et Juan, comme un chant du matin et de rythmer la journée par des ponctuations poétiques au gré des interventions.

    Puis il y a eu la polémique autour de la Mairie de Lyon. Les interrogations, la peur de l'amalgame, ai-je écrit dans mon mail de samedi dernier. Dimanche, les réponses nous ont redonné force. Nous nous sommes remis au travail : répétitions, achat des billets de trains, recueils…

    Cependant les incertitudes et les tensions persistent. Lundi soir, on ne peut écarter des "risques" de troubles. Comment nous, auteurs et colporteurs-liseurs, pourrons-nous lire dans cette tension et comment pourrons-nous faire face à une hostilité ? La parole intime a besoin de quiétude et ne se dit pas sous un ciel menaçant. Nous nous sentons prisonniers dans quelque chose qui nous dépasse.

    Les réactions des adhérents de Coup de soleil résonnent de leurs engagements. Le nôtre, pour cette rencontre, a été dans le choix de l'écriture. Sans doute, étions-nous dans un monde un peu différent, créatif et indompté.

    Faire une lecture publique est toujours une joie, celle de dire les poètes qui nous font vivre, de partager une parole née des profondeurs de l'être. 

    Ce n'est pas de gaieté de cœur que nous renonçons.

    André Cohen Aknin et Geneviève Briot (en accord avec l'équipe) 
    Le 1 février 2023