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  • Lecture à la maison de retraite

    Nous sommes à l'EHPAD de Romans, résidence Clairefond, le jeudi 11 mars.

    Les résidents ont fait demi cercle devant nous. S'ils sont là, c'est que ce sont des personnes « désorientées », leur vitalité s'est détricotée, en vieillissant et leur esprit s'est embrumé. Certains ont une véritable attente, d'autres semblent absents. Une femme chantonne interminablement « le plus beau des tangos du monde ».

    Donner à entendre des histoires, c'est tenter de renouer le fil des mots aux événements d'une vie. Des histoires courtes, des poèmes. « La gamelle » d'Italo Calvino rappelle le repas qu'on emportait pour manger à midi sur le lieu de son travail. « Ouiquenne » de René de Obaldia fait jouer les mots, les rythmes. Un poème dit l'importance de l'eau et nous emmène dans le désert. Un boulanger dans un village converse avec Najib le petit Algérien, José le petit infirme dit son plaisir de goûter le printemps sur le pas de la porte. Les textes offrent des sensations, invitent à l'évocation de quelques souvenirs chez les spectateurs. Oui, ils se souviennent de la gamelle, des départs de la famille en voiture. Des visages s'éclairent. La musique des mots exerce un pouvoir dont on ne connaît pas l'impact.

    Nous finissons sur un poème de Raymond Queneau mis en musique et nous chantons ensemble. Une dame parle de « La nuit de Rameau » qu'elle chantait autrefois dans son village. Sa voix s'élève, un peu rocailleuse mais juste : « Oh nuit qu'il est profond ton silence ! ». Les mots que la mémoire restitue sont là, bien vivants. Je veux vous embrasser, dit-elle à Geneviève, au moment du départ.

    Cette lecture s'est faite à l'initiative de l'Association Bleu 31